Avec leur 2ème place au palmarès mondial, les « majors » français du BTP savent construire vite et mènent leur transformation numérique pour gagner encore en efficacité. Le BIM (Building Information Modeling) s’installe progressivement en Europe et en France comme l'outil pour la numérisation de la gestion de chantier. On considère l'année 2014 comme « l’an 0 » avec la mise en place des acteurs et la transposition de la directive européenne. Avec le lancement du PTNB (Plan de Transition Numérique dans le Bâtiment) le BIM rentre dans les mœurs mais se cantonne encore souvent uniquement aux phases amont (conception) et aval (exploitation) des projets. L’enjeu de 2018 est de le faire entrer entièrement sur la gestion de chantier, en phase d’exécution.
Pourquoi l’exécution, étape cruciale, accuse-t-elle un retard significatif en matière de numérisation ?
Le BIM s’insère lentement sur la phase travaux car les outils ne sont pas suffisamment adaptés au terrain. Sur la gestion de chantier, les femmes et les hommes qui réalisent les travaux au quotidien ne sont ni formés ni habitués à l’informatique et les logiciels ne leur sont pas destinés. On leur fournit des plans et ils réalisent les travaux, leurs outils sont matériels et leur expertise est manuelle. Chacun son métier !
Le logiciel BIM a été conçu pour la création de maquettes 3D avec des logiciels complexes destinés aux ingénieurs ou architectes des bureaux d’étude, sans avoir été adaptés aux artisans. Hommes de terrain, leur valeur ajoutée n’est pas sur la maîtrise de l’informatique mais bien sur la maîtrise des méthodes de construction.
Une étude de PTNB de mars 2017 recense que « le manque de compétences au sein de l’entreprise » est l’un des principaux freins à l’utilisation du BIM. De plus seulement 35% des entreprises de 10 à 49 salariés utilisent des plateformes collaboratives contre 60% pour les entreprises générales. Ceci doit être mis en avant car au bout de la chaîne, ce sont ces entreprises qui construisent !
Ces derniers mois marquent un tournant avec l’arrivée sur le marché de solutions numériques mobiles adaptées aux travaux. Une tablette ou un smartphone suffisent aujourd’hui à l’exécutant à accéder aux informations principales le concernant. L’informatique devient simple, ergonomique et adaptée. Le sous-traitant n’hésite plus à collaborer et il adhère au système. Résultat : Gain de temps et d’efficacité !
La maquette numérique est importée sur les tablettes, les hommes de terrain savent exactement où aller, pour quoi faire et où trouver les matériaux stockés. (40% du temps d’un ouvrier sur un chantier était perdu à marcher pour chercher son matériel ou sa zone de travail…).
C’est là que se situe tout l’enjeu du BIM des années à venir : compléter la vision théorique de la conception avec l’expérience pratique de la gestion de chantier et livrer un retour d’expérience complet et numérique. Ceci est rendu possible par l’ouverture à la collaboration des acteurs du terrain. Le « carnet de santé numérique » du bâtiment, image 100% fidèle à la réalité de ce qui a été construit, accompagne l’ouvrage ensuite pendant toute son existence.
Nouveau fer de lance de l’industrie du Bâtiment, celui-ci a également vocation à remettre l’humain au centre des objectifs de réussite. Depuis 2 ans les entreprises générales françaises expérimentent la méthode du Last Planner System qui révolutionne la gestion des chantiers.
La méthode des post-it a vocation à favoriser l’engagement et l’implication de chaque sous-traitant.
On oublie la politique du « bâton » qui consistait à maintenir la pression forte afin que l’exécutant travaille le plus vite possible, on supprime le temps perdu à écrire des courriers pour se justifier ou se protéger, on évite la précipitation du « tout ce qui est fait n’est plus à faire » mais on met tout le monde autour de la table en restaurant la confiance entre les acteurs du chantier : la communication et la collaboration sont au premier plan, l’exécutant devient un partenaire du succès.
Les éditeurs de logiciels se positionnent aujourd’hui sur la dématérialisation de ce processus. On garde toute la valeur ajoutée du système mais on y ajoute la puissance de l’informatique de manière adaptée au chantier. Le planning est mis à jour instantanément à la sortie de chaque réunion et atterrit sur le smartphone du sous-traitant. Chaque modification apportée au planning entraîne un calcul instantané de l’impact sur la date finale des travaux….
Aujourd’hui les clés de l’innovation viennent de l’humain. Les technologies et les processus s’adaptent à celui-ci et non plus l’inverse. Pour le secteur du BTP, la numérisation de la gestion de chantier et le BIM sont une véritable transformation qui se dessine pour les années à venir.